Séoul, des galeries à foison

Avec la K-pop et le cinéma d’avant-garde, l’art contemporain est l’autre vitrine de la Corée du Sud. Visite de Séoul où tout va vite en compagnie de Guillaume Piens, le directeur d’Art Paris, qui a invité au Grand Palais les meilleures galeries, dans le cadre de l’année France-Corée.

«Bali bali ! » (vite, vite !) est une expression courante à Séoul. La mère la dit à l’enfant, le patron à l’employé, le professeur à l’élève. Dans les années 60, le PIB de la Corée du Sud ne dépassait pas celui du Cameroun. Aujourd’hui, le pays est la treizième puissance économique du monde. On ne devient pas un modèle de croissance en traînant les chaussons.
« Bali bali ! », lance Guillaume Piens au taxi, en arrivant à l’aéroport d’Incheon. À peine remis du jet lag, le directeur d’Art Paris est déjà prêt à faire le tour des galeries coréennes qui sont les invitées de sa foire cette année. À Séoul, les buildings à vitres teintées traduisent une frénésie immobilière qu’aucune politique d’urbanisme ne tempère ; les néons clignotent 24 heures sur 24 et le monde de l’art est lui aussi pressé de prendre sa place dans le concert mondial. Hong Kong et Shanghai ont pris de l’avance, mais à la vitesse à laquelle les galeries, les musées et les fondations privées poussent à Séoul, le pays ne se laissera pas distancer longtemps. « La Corée est en pleine expansion. Les écrans Samsung, la K-pop, les K-drama, la mode, le cinéma, les Sud-Coréens excellent dans tous les domaines, explique Guillaume Piens. L’art contemporain constitue un autre enjeu important pour eux, une vitrine portée par de très grands artistes. » De fait, les galeries occidentales se disputent désormais les stars coréennes : Lee Bul est représentée par Thaddaeus Ropac, Lee Ufan par la Pace Gallery et Kamel Mennour, Do-Ho Suh par Lehmann Maupin, Seo-Bo Park par Emmanuel Perrotin…
Traditionnellement, les galeries se trouvent dans le quartier de Jongno et se sont regroupées autour du National Museum of Modern and Contemporary Art (MMCA). Vite, vite ! Il faut découvrir, à la galerie Arario, l’artiste Osang Gwon qui crée des personnages en 3D, hybridant sculpture et photographie. Il faut pousser la porte des galeries Kukje et Hyundai, les plus puissantes de la ville. Il faut rendre visite à la galerie Hakgojae, dont l’artiste Chung Hyun investira au printemps les jardins du Palais-Royal avec ses totems de bois et de fer. Le quartier de Jongno est touristique, semé de maisons traditionnelles et de boutiques qui croulent sous les babioles en plastique. Pour rejoindre les flagships de luxe, il faut se rendre dans le quartier plus chic de Gangnam. L’excellente galerie Park Ryu Sook y est voisine de l’immense boutique Hermès. La galerie 313 Art Project, où Bernard Arnault achète la fine fleur de la création sud-coréenne, est à deux pas de la boutique Dior qui a poussé comme une fleur sur Apgujeong-ro. Si on se lasse des vitrines clinquantes, rien n’empêche de prendre de la hauteur. Sur le mont Bukhansan, l’une des nombreuses collines qui enserrent la ville, on trouve la galerie Gana, dont le bâtiment a été dessiné par Jean-Michel Wilmotte. Les corbeaux règnent ici depuis des millénaires. Leurs trajectoires noires évoquent le trait sûr de Se-Ok Suh, le maître des encres sur papier de riz. L’artiste expose justement au MMCA. Vite, vite ! Il faut redescendre ! Le sud du pays du Matin calme ne le reste jamais longtemps.

Séoul, des galeries à foison