Il était temps que Françoise N’Thépé et Aldric Beckmann commettent un livre. Vu l’exigence et la sensibilité qu’on prête à ce duo d’architectes, il se devait d’être spécial. Pas pour épater mais pour convaincre en restant fidèle à leur identité. Couverture vert pâle, reliure anti-déchirure : l’ouvrage commence par un portfolio de projets. Le photographe Olivier Amsellem n’est pas doué pour enregistrer platement la réalité. Son truc, c’est plutôt de fixer ce que l’architecture peut faire ressentir, parfois un sentiment d’harmonie, parfois un soupçon de mystère.
Du coup, des logements de Boulogne (92) pourraient aussi bien être à Miami. Des scènes du quotidien de ces architectures se suivent en soulignant le feeling qui s’en dégage. C’est sans ponctuation que l’écrivain Éric Reinhardt entrecoupe ces pages de récits de projets du studio, non pas fantômes mais qui ont mal fini. C’est rare d’en entendre parler dans un livre. Surtout quand on sait ce que cela représente comme blessures pour des architectes.
Le livre nous rapproche plus précisément d’un studio dont on retrouvera bientôt le travail à Aulnay, dans l’une des gares de la ligne de métro qui va faire le tour de Paris. Ce sont des praticiens comme eux qui conditionnent un feeling heureux de la ville. Le lecteur découvre progressivement tout ce qu’un architecte peut faire pour maintenir le maximum d’intégrité à son projet face à des normes, des clients ou des institutions.
La troisième partie du livre, dont les textes sont en anglais et en français, consiste en une interview-fleuve des architectes. Lui-même architecte de formation, le journaliste et éditeur Nikola Jankovic connaît bien Beckmann & N’Thépé. Ils vont lui raconter leur vision de leur parcours avec rencontres et anecdotes fondatrices. L’interview développe ainsi comme un scénario de film à rebonds le récit édifiant d’une véritable aventure humaine.
B/NT, Editions Loco d’Olivier Amsellem, Eric Reinhardt et Nikola Jankovic, 39 €. Editions Loco.
