Portrait : Franklin Azzi, architecte hybride

À 42 ans, Franklin Azzi n’a pas le temps de s’ennuyer. Ne craignant pas le grand écart entre culture populaire et grand luxe, l’architecte enchaîne les projets à un rythme soutenu, avide de se confronter à toutes les situations, sans a priori. Parfaitement ancré dans son époque, il puise pourtant son inspiration ailleurs, réfutant tout caprice esthétique au profit d’une architecture efficiente. Nous l’avons rencontré cet automne, dans ses bureaux parisiens.

Réinterpréter l’Histoire

L’activité de ce touche-à-tout qui assume sa « grande maniaquerie » ne connaît pas la crise et enchaîne les projets et les concours à un rythme effréné dans un milieu très concurrentiel : « Quand j’ai le moins bon projet, ça ne me dérange pas de perdre », concède-t-il. L’agence compte aujourd’hui 45 personnes aux profils multiples, un éclectisme garant d’une énergie constamment renouvelée. Dans le cadre de la consultation « Réinventer la Seine », Franklin Azzi a remporté un projet de « Cabaret électro » sous le pont Alexandre-III. Pas très loin des berges de Seine, un projet portant le sceau de la politique urbaine d’Anne Hidalgo qu’il a conçu « pour activer le site » et renouer avec le fleuve libéré de la voiture.

Tout juste achevée, l’école des beaux-arts à Nantes.
Tout juste achevée, l’école des beaux-arts à Nantes. Young-Ah Kim

Il est également en charge de la gare de Chevilly du Grand Paris Express. Dans la mesure où il cultive un certain talent pour la métamorphose, la réhabilitation est une part importante de sa production. À Nantes, il vient de livrer l’école des beaux-arts dans les anciennes halles Alstom : une boîte à outils des possibles livrée à la créativité des étudiants. À Tours, il a mené un travail d’archéologie architecturale pour réveiller les imprimeries Mame, fleuron industriel du XXe siècle signé Jean Prouvé, Bernard Zehrfuss et Edgard Pillet, qui accueillent désormais l’école des beaux-arts.

Les anciennes imprimeries Mame, transformées pour accueillir l’école des beaux-arts de Tours.
Les anciennes imprimeries Mame, transformées pour accueillir l’école des beaux-arts de Tours. Luc Boegly

Sans craindre le grand écart, il planche sur le futur Mama Shelter dans le quartier de Business Bay à Dubai : une tour élégante, caractérisée par une enveloppe de verre couvrant une peau intérieure en bois. « Ce n’est pas parce qu’il est à Dubai que le bâtiment doit ressembler à un flacon de parfum ! » sourit-il. Si Franklin Azzi surfe avec habileté dans son époque, il puise pourtant son inspiration dans des décennies plus anciennes, au gré des sujets, à la croisée des disciplines et des champs de réflexion. L’architecte essaye de se tenir à distance de ce qui se produit aujourd’hui, intellectuellement du moins : « La page blanche est une illusion. Nous sommes tellement abreuvés d’images. Je ne veux être ni influencé ni découragé. »

Le Mama Dubai, dont l’ouverture est prévueen 2020.
Le Mama Dubai, dont l’ouverture est prévueen 2020. Franklin Azzi Architecture