San Sebastián, capitale culturelle de l'année 2016

Capitale culturelle de l’année 2016, San Sebastián (Donostia en basque) a le vent en poupe. On s’emballe pour sa culture surf, ses bars à pintxos, ses derniers lieux de création contemporaine et son passé Belle Époque, à seulement trente minutes d’Hendaye et de la frontière française.

San Sebastián a son Sacré-Cœur. Ce mirador haut perché sur le mont Urgull est l’endroit unique pour voir les trois plages qui festonnent la ville. Ondarreta et ses cabines de toile bleu et blanc, Zurriola et son essaim de surfeurs, et bien sûr la magistrale Concha, ourlée sur elle-même tel un coquillage. Au milieu de sa baie, l’île de Santa Clara est la petite perle que les nageurs téméraires rejoignent, l’été, en quelques centaines de brasses. Est-ce la reconstruction urbaine opérée sur les cendres de la guerre d’indépendance espagnole, le perpétuel balancier des marées à l’embouchure du fleuve Urumea ou la douceur du climat qui attira la reine régente María Cristina ? Sans doute un peu des trois, car, depuis 1893, la cour quittait chaque été la fournaise madrilène pour les salons du palais de Miramar, villégiature au style cottage anglais. Non loin de son parc, balayé par les embruns, se tient un pavillon de bains posé sur le sable. On y respire le grand air de la Cantabrique.

Dans le sillage des grands d’Espagne, le petit port devint un Monopoly balnéaire, multipliant les hôtels de luxe, les villas cossues, les ponts rococo, les casinos, théâtres et jardins plantés de tamariniers. Dès lors, même aux pires heures de la terreur séparatiste, la prospérité ne se démentira plus et affichera – encore aujourd’hui – le mètre carré le plus cher de la nation. Désormais, en dévalant le mont Urgull, on accède directement à la vieille ville, ce casco viejo où chaque soir les ruelles étroites se remplissent et cèdent au rituel du txikiteo, la tournée des bars entre amis. On y partage les typiques pintxos et les verres de txakoli, un vin blanc local et vif. Car ici, sur la côte basque, bien plus qu’ailleurs, la gastronomie fait partie du patrimoine culturel. Depuis 2011, l’université Basque Culinary Center accueille des étudiants du monde entier. En témoignent également les seize étoiles Michelin que totalise la région : un record. Sans parler de l’incontournable marché quotidien de La Bretxa, des cidreries et du txotx nouveau (cidre basque) dont la saison de dégustation, de janvier à avril, jalonne la vie sociale.

San Telmo Museo, San Sebastián.
San Telmo Museo, San Sebastián. Ludovic Maisant

Tandis que le clocher de la basilique Santa Maria sonne ses dix coups, le musée San Telmo, lui, ouvre ses portes. Le couvent dominicain du XVIe siècle, agrandi par un geste architectural avant-gardiste (de Nieto Sobejano Arquitectos), accueille « Tratado de paz (traité de paix) », l’exposition centrale de Donostia San Sebastián, capitale européenne de la culture, soit guerres et paix détaillées en cinq siècles, de 1516 à aujourd’hui, et en 400 œuvres, de Goya aux rares images des sonderkommandos (les unités de travail dans les crématoires).

Pour remporter ce titre culturel convoité, souvent catalyseur d’intérêt pour une ville, San Sebastián a davantage misé sur le projet sociétal, le « vivre-ensemble » des hommes et des générations, que sur la construction de bâtiments spectaculaires. Pour autant, la ville ne manque pas de totem : le Kursaal, deux rocs de verre dépoli servant de palais des congrès signés Rafael Moneo, incarne un goût prononcé pour les festivals (cinéma du fantastique ou du surf, théâtre, musique…). Trait d’union entre les plages de la Concha et de Zurriola, autant que rempart de Gros (le quartier branché), cette architecture contemporaine contraste volontiers avec les réverbères Art déco du pont battu par les vagues ou avec les arcades colorées de la place de la Constitucíon, qui servait jadis d’arènes taurines. C’est en cela que la ville est séduisante dans son maelström d’églises baroques, de quartiers romantiques sagement quadrillés ou d’énormes sculptures d’Eduardo Chillida harcelées par les vents, qui, tous à leur façon, surlignent le paysage grandiose. À la Belle Époque, l’influence française fut très présente. Au bord du fleuve, un « paseo de Francia », bordé de manoirs joufflus, voisine avec l’authentique marquise Eiffel qui abrite les quais de l’Estación del Norte (la gare). Dernière opération séduction, Tabakalera, une ancienne fabrique de tabac revampée à grands frais en une ambitieuse plateforme culturelle : des ateliers d’artistes, une médiathèque et des espaces d’exposition où petits et grands peuvent circuler librement, travailler, apprendre et s’amuser. Juste en dessous, insoupçonnable, la gare routière toute neuve déverse son flot de touristes prêts à arpenter les trois kilomètres de la Concha. Un premier pas.

Y aller

San Sebastián est desservi par trois aéroports. Le plus proche est à 20 km. Biarritz se situe à 30 km, Bilbao, à 100 km. Vols Vueling depuis Paris (avec escale à Barcelone), à partir de 45 €.