L'East London style

Paradoxe réjouissant : tandis que blogs et Instagram grignotent un peu plus chaque jour la zone d’influence des médias traditionnels, la presse lifestyle indépendante, et tout particulièrement celle qui véhicule les valeurs slow life, affiche un dynamisme insolent.

Si Monocle a assurément joué le rôle de précurseur, c’est le cultissime magazine de niche Kinfolk (@kinfolk) qui cristallise aujourd’hui cette tendance. Fondé en 2011 à Portland par Nathan Williams et Katie Searle-Williams et dorénavant implanté à Copenhague – ville du hygge* par excellence –, ce trimestriel imprimé sur papier mat fait en effet figure de bible slow life absolue pour les créatifs de la génération Y.

La couverture du douzième numéro du magazine « Kinfolk ».
La couverture du douzième numéro du magazine « Kinfolk ». DR

Au fil des pages où la sacro-sainte trilogie blanc-beige-gris règne en maître, la blondeur du bois brut fait écho à celles des tranches de pain maison tout juste sorti du four ou d’un cappuccino mousseux orné d’un motif cœur impeccablement réussi. Contrairement aux fondamentaux de la presse décoration classique, c’est la cuisine et non le salon qui est ici en vedette. Pas de Warhol aux murs, mais des collections de céramiques déroulant leurs camaïeux monochromes sur des étagères sans montants. Une esthétique « mode de vie » tellement identifiable et « aspirationnelle » que l’on ne peut que se demander quand apparaîtra le premier filtre « Kinfolk mood » sur Airbnb, le hashtag #kinfolk étant, lui, déjà spontanément utilisé des millions de fois chaque jour sur Instagram ! Car derrière ce magazine qui ravit les bobos et s’impose comme label (diktat ?) du nouveau bon goût dans les concept-stores ou les chambres d’hôtel partout dans le monde, se dessine un vrai business-modèle.

« The Kinfolk Home », déclinaison déco du magazine.
« The Kinfolk Home », déclinaison déco du magazine. DR

La société Ouur, qui produit Kinfolk, édite ainsi des livres de cuisine (The Kinfolk Table) et de décoration (The Kinfolk Home) et a développé, en partenariat avec l’enseigne de mode nippone Actus, une ligne de vêtements pour hommes et femmes, commercialisée en exclusivité au Japon. Ouur signe également les séries publicitaires des marques qui sont annonceurs dans le magazine et produit du contenu pour des clients tels que Zara, Diesel, LG ou Isetan.

« The Kinfolk Table », déclinaison culinaire du magazine.
« The Kinfolk Table », déclinaison culinaire du magazine. DR

À Copenhague enfin, la Kinfolk Gallery aménagée par Norm Architects accueille expositions, pop-up stores, prises de vue et dîners VIP. Cereal (@cerealmag) a, quant à lui, été fondé en 2012, à Bristol, par la Canadienne Rosa Park, ancienne experte en marketing luxe et beauté. Celle-ci est dorénavant installée à Bath (Angleterre), loin de l’agitation des capitales. Ce magazine de culture et de voyage où le blanc-beige-gris est également de rigueur privilégie des reportages aux photos exclusives qui se déroulent en toute quiétude sur 14 ou 16 pages : un must.

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