Portrait : Eduardo Souto de Moura, un architecte de la mémoire

Ancien assistant d’Alvaro Siza, Eduardo Souto de Moura (1952-) est devenu, comme son maître, un grand nom de l’architecture contemporaine, récompensé d'un Pritzker Prize en 2011. IDEAT vous explique comment en trois étapes portugaises.

Né en 1952 à Porto, Eduardo Souto de Moura fait son apprentissage dans le sillage de deux maîtres que sont Alvaro Siza et Fernando Tavora. Sa collaboration avec le premier lui a notamment permis de focaliser sa pratique sur le rapport aux détails, aux matériaux et aux techniques locales. Autant d’éléments qui lui permettent de capturer l’essentiel d’un territoire à travers ses bâtiments. Passé maître dans la reconversion, Souto de Moura récupère dans la mesure du possible les constructions afin de les sublimer en les fusionnant ou en les juxtaposant avec d’autres bâtis de sa conception, tout en respectant le contexte d’origine. Il vient de le démontrer en réhabilitant avec brio la Comédie de Clermont-Ferrand. La simplicité est son langage. Elle lui permet de révéler et préserver la mémoire historique et patrimoniale tout en visant le fonctionnel et la programmation. IDEAT vous propose un portrait à travers trois architectures emblématiques.


A Cascais, La Casa das Historias (2009)

Centre culturel et lieu d’exposition temporaire, la Casa das Historias est située à Cascais, une station balnéaire proche de Lisbonne. Avec elle, Souto de Moura s’éloigne de l’abstractionnisme moderne, une caractéristique dominante de son travail, pour valoriser un héritage formel de compositions architecturales. Telles des cheminées habitées évoquant celle de la cuisine de l’abbaye d’Alcobaça (XIIIe siècle), la Casa das Historias assume son héritage lié à l’architecture religieuse. Ces tours pyramidales couleur terracotta font signe dans le paysage et dans le parc verdoyant dont les arbres centenaires ont été préservés. Souto de Moura a pris soin de garder le site dans son état d’origine, tout en posant cette architecture à la frontière du modernisme et de la tradition. Les quatre ailes de différentes hauteurs et tailles qui composent le bâtiment abritent 750 m2 de salles d’exposition. La boutique et l’auditorium de 200 places prennent position dans un décor intérieur qui souligne le patrimoine du site grâce au marbre bleu-gris de Cascais.

> Av. da República 300, 2750-475 Cascais, Portugal.

Formes pyramidales de la Casa das Historias.
Formes pyramidales de la Casa das Historias. valentine rouillon
L’entrée de la Casa das Historias.
L’entrée de la Casa das Historias. valentine rouillon
Des menuiseries miroirs à la base des « pyramides ».
Des menuiseries miroirs à la base des « pyramides ». valentine rouillon
Les décalages de hauteurs de la Casa das Historias.
Les décalages de hauteurs de la Casa das Historias. valentine rouillon

A Porto, La Casa das Artes (1988)

La Casa das Artes fut confiée à Eduardo Souto de Moura après un appel à projets public pour la construction d’un équipement culturel dans la ville de Porto. Au fond du jardin d’une maison construite en 1927, le bâtiment achevé en 1988 se dissimule à travers la végétation. Un mur surmonté de végétation fait office de délimitation de terrain. Impossible du coup de distinguer la Casa das Artes depuis le jardin. La brique, la pierre et le verre réfléchissant créent harmonieusement une illusion de prolongement du jardin. C’est en s’approchant que l’on détecte l’entrée et les différents niveaux qui constituent les trois « sculptures architecturales » : l’auditorium, la salle des expositions et le cinéma.

> R. Ruben a 210 081, 4150-639 Porto, Portugal.

La maison derrière laquelle se cache la Casa das Artes.
La maison derrière laquelle se cache la Casa das Artes. DR
L’entrée de la Casa das Artes est dissimulée derrière un mur.
L’entrée de la Casa das Artes est dissimulée derrière un mur. DR
Les matériaux favorisent la dissimulation.
Les matériaux favorisent la dissimulation. DR
Une des salles d’exposition de la Casa das Artes.
Une des salles d’exposition de la Casa das Artes. DR
La salle de cinéma de la Casa das Artes.
La salle de cinéma de la Casa das Artes. DR

A Porto, la station de métro Bolhao

Le nom donné à cette station de métro construite en 2005 provient de sa proximité avec la Casa da Musica de l’architecte néerlandais Rem Koolhaas. Cette gare située dans le quartier Boavista combine modernité et références patrimoniales à la ville de Porto. Depuis la rue, le bâtiment blanc à la signalétique bleue s’aligne avec les autres constructions. Depuis la place, la façade immaculée crée une rupture brutale dans le paysage. Eduardo Souto de Moura prône le rappel à la mémoire. Ainsi, le carrelage blanc et bleu qui donne du relief aux façades planes de l’entrée du métro, est l’élément moderne qui prolonge la faïence traditionnelle du bâtiment situé latéralement. Pour l’architecte, il ne s’agit pas de construire un bloc à entrée unique pour enfermer les voyageurs dans la station, mais plutôt de créer une transition et inviter au voyage.

> Rua de Santa Catarina 429, 4000-124 Porto, Portugal.

La façade de brique est simplement ornée d’un motif rappelant le logo du métro.
La façade de brique est simplement ornée d’un motif rappelant le logo du métro. Luis Ferreira Alves
A l’intérieur, Souto de Moura joue l’horizontalité et la minéralité.
A l’intérieur, Souto de Moura joue l’horizontalité et la minéralité. Luis Ferreira Alves
Les carreaux peints rappellent la tradition portugaise des azulejos.
Les carreaux peints rappellent la tradition portugaise des azulejos. Luis Ferreira Alves