Anniversaire : Rock the Kasbah, l’agitateur de l’artisanat tunisien

En 2011, Philippe Xerri fonde Rock The Kasbah pour livrer une interprétation contemporaine de l’artisanat tunisien. À l’occasion de ses 10 ans, il revient sur son histoire et lève le voile sur la réédition de plusieurs best-sellers.

Comment Rock the Kasbah est-elle née ?
Philippe Xerri (Rock the Casbah) :
Avec mon ami et associé Martial Viahero, nous nous sommes installés à Tunis il y a une quinzaine d’années. Le caractère cosmopolite de cette ville m’a tout de suite fait me sentir chez moi. J’ai créé des collections pour des marques de décoration et d’accessoires de mode tunisienne en valorisant l’artisanat local. Face au succès qu’elles ont rencontré, j’ai eu envie de fonder ma propre enseigne afin de revisiter ces savoir-faire. Nous l’avons lancée le 3 janvier 2011, quelques jours avant le début de la révolution de Jasmin, dont l’élan nous a vraiment portés.

Votre projet était finalement annonciateur d’un retour à l’artisanat dans le design…
C’est vrai. À l’époque, le design rimait plutôt avec plastique et métal. Et contrairement au Maroc, qui avait une politique de valorisation des techniques ancestrales, l’artisanat tunisien était seulement usuel. Traditionnellement, le mobilier est épuré et les tissages sont sobres : il était donc facile de leur apporter une touche de modernité. On a aussi eu la chance de rencontrer des artisans en accord avec cette philosophie, aptes à l’appliquer.

Quelles traditions avez-vous ainsi réinterprétées ?
Dans le nord-est du pays, le village de Sejnane est célèbre pour la qualité de sa terre argileuse. Les femmes y façonnent des poteries modelées à la main. Leur pratique est même inscrite sur la Liste représentative du Patrimoine culturel immatériel de l’humanité ! On a eu l’idée d’utiliser cette terre pour créer des pieds de lampe à la patine incroyable. Une autre de nos pièces phares, depuis la première collection, est le fauteuil en kilim coloré. Jamais ce tapis vintage n’avait été détourné pour créer une assise. Or, les retours ont tout de suite été extrêmement positifs

« On a fait le choix d’intégrer les artisans à l’entreprise afin que leur savoir-faire subsiste »

Vous mettez l’accent sur les matières naturelles …
Philippe Xerri (Rock the Casbah) : Oui, on a recours à la fibre de palmier, à l’alfa, au bois d’acacia, à la laine et au coton notamment. Et de manière générale, on met autant que possible l’accent sur le recyclage : les gourmands des oliviers, qui d’habitude sont voués au feu, nous, nous les utilisons pour faire du mobilier et limitons ainsi nos achats et nos déchets.

Comment la marque s’est-elle développée en dix ans ?
Dès le début, on a fait le choix d’intégrer les artisans à l’entreprise afin que leur savoir-faire subsiste. Tisserands, menuisiers, potiers, céramistes… Notre atelier de La Soukra, en banlieue de Tunis, compte aujourd’hui une quarantaine de salariés. Et nous avons aussi d’autres ateliers dans le pays. En plus de notre boutique de Sidi Bou Saïd, il existe trois magasins en France : à Marseille, à L’Isle-sur-la-Sorgue et désormais à Paris, dans le VIe arrondissement. L’adresse de la capitale réunit sur 50 m2 nouveautés et best-sellers.

« On voulait un retour à la terre, aux couleurs douces et des rondeurs, tout en conservant un esprit très méditerranéen »

À quoi ressemblera votre collection anniversaire ?
Philippe Xerri (Rock the Casbah) : Certaines de nos créations ont inscrit Rock the Kasbah dans la mémoire collective : on tenait donc à rééditer dix pièces iconiques, mais dans de nouveaux formats et couleurs. Parmi elles, il y a notre lampe No 2 en céramique et fibre de palmier, mais cette fois en taille XXL, une petite table boomerang et un fauteuil à pompons. Quant à notre collection printemps-été, on a imaginé des pièces usuelles et rassurantes. On voulait un retour à la terre, aux couleurs douces et des rondeurs, tout en conservant un esprit très méditerranéen.

Quels sont vos projets à venir ?
L’année 2020 nous a amenés à passer plus de temps chez nous. J’ai donc envie de développer notre collection de textile dans un esprit cocooning. L’automne dernier, on a aussi relancé « Little », notre ligne pour enfants, qui se compose de tapis douillets, de luminaires poétiques et de coussins colorés. Enfin, on rêve d’ouvrir une maison d’hôtes en France où dévoiler notre art de vivre, mais il faut pour cela trouver le lieu idéal !

> Rock The Kasbah. 28 rue Jacob, 75006, Paris. Rockthekasbah.net

Philippe Xerri, fondateur et directeur artistique de Rock the Kasbah, utilise les savoir-faire tunisiens dans la fabrication des piècesde décoration. Une manière de pérenniser certaines pratiques en les modernisant.
Philippe Xerri, fondateur et directeur artistique de Rock the Kasbah, utilise les savoir-faire tunisiens dans la fabrication des pièces
de décoration. Une manière de pérenniser certaines pratiques en les modernisant. quentin lasco
Modèle emblématique de la marque depuis ses débuts, le lampadaire Branche est l’un des premiers produits lancé par Rock The Kasbah. Abat-jour en fibre de palmier et bois d’olivier. Lampadaire Tramontane.
Modèle emblématique de la marque depuis ses débuts, le lampadaire Branche est l’un des premiers produits lancé par Rock The Kasbah. Abat-jour en fibre de palmier et bois d’olivier. Lampadaire Tramontane. quentin lasco
La boutique parisienne de la marque dans le VIe arrondissement.
La boutique parisienne de la marque dans le VIe arrondissement. quentin lasco