GCG à toutes les échelles

Les trois architectes qui se cachent derrière GCG ne craignent pas les grands écarts. La pluridisciplinarité s’est imposée comme leur marque de fabrique.

À travers leurs réalisations, Alexandre Goulet, Olivia Charpentier et Dev Gupta défendent une architecture ancrée dans son territoire, collaborative et éthique mais aussi le savoir-faire des artisans. Nous avons rencontré GCG, un trio passionné, dans son agence parisienne.

Un enthousiasme contagieux

Le trio envisage l’architecture comme une façon de se mettre au service de la société.
Le trio envisage l’architecture comme une façon de se mettre au service de la société. DR

La première impression qui se dégage de notre rencontre avec GCG est l’enthousiasme dont ses associés semblent être naturellement dotés. Si nombre d’architectes ont une certaine appétence pour la complainte, compréhensible au regard des conditions difficiles dans lesquelles ils exercent leur métier, le trio paraît avant tout guidé par la ferveur et l’envie d’en découdre dans un monde dont il observe les mutations avec clairvoyance. Derrière cet acronyme se cachent Alexandre Goulet (1984-), Olivia Charpentier (1984-) et Dev Gupta (1980-), tous diplômés de l’École nationale supérieure d’architecture de Versailles où ils se sont simplement croisés.

C’est en 2006, à la faveur d’un voyage d’études en Chine, que se sont nouées leurs affinités amicales et créatives, autour d’un concours aux dimensions XXL dont seul l’empire du Milieu a le secret : la conception du nouveau centre-ville de Chongqing. Cette opportunité leur offre l’occasion de découvrir leur complémentarité. « On s’est bien entendus, l’idée d’une agence a très vite germé », se souviennent-ils. Ils vont néanmoins faire leurs armes chez différents architectes reconnus (Valode et Pistre, Rudy Ricciotti…) avant de créer GCG Architectes en 2012, à Paris. Ils démarrent leur activité avec un projet d’hôtel, suivi d’un concours en 2013 pour un programme de 99 logements à Bagnolet qu’ils vont remporter, malgré leur manque d’expérience en la matière. Un projet qui témoigne du temps long que requiert parfois l’architecture puisqu’il vient tout juste d’être livré.

S’ensuivent rapidement d’autres commandes, des logements, des hôtels et environ 150 appartements. Mais aussi des restructurations de bureaux, des parkings, et de luxueuses maisons à Paris, en Sardaigne ou à Londres. Dix ans plus tard, l’agence compte une quinzaine de collaborateurs. D’abord installés à Bastille, ils ont rejoint le IXe arrondissement, à deux pas de l’hôtel Drouot, au sommet d’un immeuble haussmannien surplombé d’un toit-terrasse avec vue à 360° sur la capitale.

Artisanat et souci du détail

L’agence, qui compte une quinzaine de collaborateurs, s’est installée dans IXe arrondissement de Paris.
L’agence, qui compte une quinzaine de collaborateurs, s’est installée dans IXe arrondissement de Paris. DR

La pluridisciplinarité constitue l’ADN de l’agence. Entre l’architecture, l’architecture intérieure et le design, le choix a été fait d’osciller entre les échelles sans jamais s’enfermer dans une seule dimension. Ainsi, GCG ne craint pas le grand écart et c’est avec le même engouement qu’une table ou des logements sont dessinés. Si l’agence principale est située à Paris, une antenne est également présente en Chine et une autre à Delhi. Car s’il est une spécificité de GCG, c’est le rapport qu’elle entretient avec l’Inde, dont est originaire Dev Gupta. Un pays où tout va très vite, ce qui oblige d’y avoir des attaches pour parvenir à se faire une place, « un territoire de possibles, un environnement propice aux nouvelles idées », résume Dev Gupta.

Si, aujourd’hui, certains architectes confient à d’autres l’exécution des travaux, GCG s’y attelle avec une obsession assumée. De même qu’elle entretient une relation étroite avec l’artisanat. Parmi ses marottes figure en effet la volonté de renouer avec la tradition des collaborations entre les architectes et les artistes, « défendre l’intelligence locale, porter un patrimoine immatériel ». Elle n’aime rien moins que de réinterpréter les techniques ancestrales de façon contemporaine, de détourner les codes classiques.

Dans un triplex parisien repensé par l’agence d’architecture GCG.
Dans un triplex parisien repensé par l’agence d’architecture GCG. FRANCIS AMIAND

Les commandes privées, maisons ou appartements, donnent l’occasion aux trois associés de pousser très avant le développement de réponses spécifiques. Ils ont la chance d’avoir une clientèle avec des budgets confortables qui leur permettent d’explorer cette voie : « Pour nourrir nos projets, nous allons chercher dans nos histoires personnelles et dans celles de nos clients. » Avec un certain sens de la mise en scène, sans jamais verser dans l’ostentation, les projets témoignent de la précision avec laquelle chaque commande est abordée. Ils conçoivent des maquettes numériques pour régler l’ensemble des problèmes techniques et donner ensuite libre cours à leur créativité. « Nous appliquons les méthodes de l’architecture à l’architecture intérieure », expliquent-ils.

À mille lieues de la décoration, leur travail va ainsi de l’architecture et de la technique au choix des coussins, comme dans cette maison située dans le XVIe arrondissement de Paris qu’ils ont réalisée pour une cliente passionnée par l’Inde. Chaque ouvrage est unique et ne ressemble à aucun autre, tant le sur-mesure fait partie de leurs habitudes. Pour eux, mener un programme de bout en bout demeure la meilleure manière de le maîtriser. Ils ont même mis au point leurs propres outils afin de gagner en efficacité : « Nous essayons d’améliorer les process pour toujours rester dans la créativité. » 

À Paris (XVIe), dans un hôtel particulier entièrement restructuré par l’agence.
À Paris (XVIe), dans un hôtel particulier entièrement restructuré par l’agence. Robin Petillault

Architecture éthique

Le projet d’un immeuble de 60 logements, rue du Faubourg-du-Temple, à Paris (Xe).
Le projet d’un immeuble de 60 logements, rue du Faubourg-du-Temple, à Paris (Xe). Topology

La définition du travail de GCG pourrait être celle d’un habile mélange entre le local et le lointain. Un travail influencé par ce qui est là, sous nos yeux, le contexte, et des inspirations plus éloignées qui donnent un supplément d’âme à chacune des réalisations. La dimension écoresponsable traverse également toute la production. Chez GCG, on ne va pas se servir d’un matériau du bout du monde sans se poser de questions. « Il faut trouver la bonne distance pour aller chercher quelque chose qu’on ne peut pas trouver ailleurs. Il s’agit de sourcer intelligemment et en pleine conscience ce qu’on utilise. »

Quand il s’agit de construire du logement social, l’exigence est la même que pour des projets aux budgets élevés : « C’est tout aussi intéressant. La réponse passe par l’échelle, les proportions, la découpe des volumes, la connexion au contexte. » Pour ce faire, le quartier est ausculté à la loupe, en quête de fragments d’histoire pour que la greffe soit réussie. C’est aussi l’attitude adoptée par l’agence en Inde, comme la nécessité de ne pas faire table rase du passé dans un pays qui se développe très rapidement. La culture de l’artisanat y est encore très vivace et se révèle une ressource inépuisable pour le trio.

Ainsi l’agence GCG envisage-t-elle l’architecture avec une certaine hauteur de vue, dans toute son épaisseur et sa complexité. « Pour nous, l’architecture est autant un état d’esprit qu’une discipline. C’est une façon globale de réfléchir. Une façon de penser le futur en accompagnant le présent. Une façon de se mettre au service de la société. Une façon de réaliser le monde de demain », résument les trois partenaires. Garder les yeux ouverts, une qualité essentielle chez les architectes.

> GCG Architectes, 25, rue Drouot, 75009 Paris.

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